Tuesday 12 August 2014

1897: Jersey et les Jersiais

Un but d'eune articl'ye dé Max O'Rell (nom d'plieunme dé Léon Paul Blouet, né l'3/3/1847 à Avranches et mort l'24/5/1903 à Paris) publiée dans La Chronique de Jersey, 1/9/1897

An extract from a travelogue-ish article about Jersey by French author Max O'Rell.

Jersey et les Jersiais
...Allez, par exemple, à un garden-party dans une des coquettes villas de Saint-Hélier; de là faites-vous conduire à la jolie plage de Plémont, au nord de l'île, et arrêtez-vous dans le village de Saint-Ouen, à cinq kilomètres de Saint-Hélier. Là, vous vous trouverez en Bretagne ou en Normandie au temps des croisades. Demandez en chemin si vous êtes bien sur la route, et le bon paysan vous répondra: "Oui, m'sieu, tout dret." Ces braves gens parlent et pensent comme on parlait et comme on pensait il y a cinq cents ans.

Voici une petite histoire de Saint-Ouen qui m'a été contée par un des premiers médecins de Saint-Hélier. Elle vous fera oublier un instant que vous approchez du xxe siècle. Un paysan du village de Saint-Ouen vient à Saint-Hélier trouver un médecin et lui amène sa fille qui est malade:

- De quoi souffre votre fille? demande le médecin.

- Ma foué, répond le paysan, j'en savons rin, et v'là pourquoué j'sommes v'nus.

Le médecin pose quelques questions à la jeune fille et l'examine.

- Je crois, dit-il, que votre fille est atrophiée. Je vais lui donner des médicaments qui lui faudra prendre très régulièrement.

- Non, non, fait le paysan, écrivez-moé le nom de la maladie sur un bout de papier.

Or, il est bon que vous sachiez que, comme en Angleterre, les médecins de Jersey fournissent à leurs malades les médicaments qu'ils ordonnent et que, à Jersey, s'ils ne fournissent pas de médicaments, ils ne peuvent rien réclamer à leurs patients. Pas de médicaments, pas de note, et les paysans de Saint-Ouen ne sont pas si ignorants qu'ils ne sachent cela; ils ne sont pas d'origine normande pour rien. Le médecin écrit donc sur un bout de paper le nom de la maladie dont la jeune fille est atteinte. Le paysan a maintenant ce qu'il lui faut. Il s'en retourne à Saint-Ouen et là, lui, sa femme et tous les membres de la famille se réunissent et se mettent à faire des incantations. On s'adresse à tous les saints du paradis les uns après les autres, et comme les saints de sauraient deviner de quoi souffre la jeune fille, le bout de papier va prouver son utilité. "Saint Pierre, crient-ils tous en choeur, guéris Marie Maillard de l'atrophie; saint Paul, guéris Marie Maillard de l'atrophie; sainte Anne, guéris Marie Maillard de l'atrophie, etc.", jusqu'à ce que la liste du calendrier soit épuisée....

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